Vers 19 h 45, un soir de la fin de septembre 1961, Brian O’Connor, alors un garçon de 7 ans, gisait sur l’asphalte au bout de sa rue dans le quartier d’Eastway Gardens à Ottawa. Il portait la chemise rayée de son frère aîné et il savait qu’elle était déchirée et tachée de sang. Son coude lui faisait mal. Il s’inquiétait d’être réprimandé parce qu’il avait abîmé ses vêtements. Il était vaguement conscient qu’un grand morceau de peau était arraché du côté gauche de son torse. Il entendait un sifflement inquiétant venant de son corps.
Un côté de son visage pressait sur l’asphalte limitant sa vision, mais il vit tout de même l’agitation au bout de la rue. Les voisins criaient et il vit son père courir vers lui en chaussettes et un air de panique sur son visage. Des policiers arrivèrent et appelèrent une ambulance. Une discussion animée commença entre son père et l’un des policiers. L’ambulance prenait trop de temps à arriver – est-ce que l’un des policiers ne pouvait les amener à l’hôpital? C’était une question de vie ou de mort. Un des policiers acquiesça et le père de Bryan monta sur le siège arrière de l’auto-patrouille avec Bryan sur ses genoux. Regardant à travers la vitre les lampadaires passés et écoutant la sirène, Bryan réalisa tout d’un coup qu’aujourd’hui serait peut-être la journée où il allait mourir. Tout le long du chemin vers le vieil hôpital d’Ottawa au centre-ville, on pouvait entendre la voix de Bryan répétant constamment : « Est-ce que je vais mourir? Je ne veux pas mourir. Je suis trop jeune pour mourir. »
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Brian O’Connor[/caption]
En arrivant à l’hôpital, Bryan fut immédiatement amené en salle d’opération pour une intervention de huit heures. Le sifflement qu’avait entendu Bryan fut rapidement identifié comme étant un poumon percé. Il avait plusieurs côtes de brisées, certaines complètement et irrémédiablement détruites. Ses blessures avaient manqué de justesse son cœur. Après avoir survécu à l’opération, Bryan fut hospitalisé durant six semaines, avec des tubes dans son dos et dans son nez.
À cause de ses blessures, Bryan a dû être particulièrement prudent en grandissant. Il n’avait pas le droit de jouer à des sports de contact et sa mère le couvait, inquiète qu’il soit à nouveau blessé. Ce sens d’extrême prudence reste encore avec Bryan à ce jour. Cela et aussi un sens profond d’être très chanceux d’être en vie. Il a eu une seconde chance.
Un des chanceux.
Maintenant à 57 ans, Bryan habite toujours Ottawa et travaille dans une compagnie de communications et de marketing à titre de consultant. La cicatrice de douze pouces de long qui commence du côté gauche de son torse et va jusqu’à son dos lui rappelle quotidiennement qu’il a frôlé la mort. Sa mère habite encore la maison familiale située sur la rue où il est presque mort. Il lui rend visite régulièrement et revit cette horrible journée chaque fois qu’il y va.
Bryan est un survivant. Peu de gens ont subi ce qu’il a subi et ont vécu pour vivre un autre jour. Bryan a été frappé par un train.
Cette journée-là, il y a 50 ans, Bryan jouait, avec ses jeunes amis âgés de cinq et de six ans, près des voies ferrées où passait le train de passagers reliant Ottawa à Toronto. Les voies ferrées étaient perpendiculaires à la rue où il habitait en faisant un cul-de-sac. Il était naturel de jouer là. Les enfants du voisinage, incluant les deux frères aînés de Bryan, utilisaient la zone autour des voies ferrées comme raccourci pour aller voir leurs amis, comme endroit pour bâtir un fort ou encore comme un endroit tranquille pour y amener une première flamme. Personne ne percevait un danger d’être là – ou encore que d’y être représentait une intrusion.
Bryan trouva un petit jouet qui sifflait lorsqu’il le balançait dans les airs. Il courut le long des voies, à côté d’un train qui allait dans la direction opposée, balançant son bras dans les airs. Le train l’a frappé – les marches frappant le côté gauche de son corps et lançant assez haut qu’il pouvait voir les passagers à travers la fenêtre du train. Si son bras avait été baissé, il l’aurait sûrement perdu.
Comment ce fait-il que cela arrive encore?
Bryan a contacté Opération Gareautrain après avoir lu un article à propos d’une jeune fille de 17 ans, habitant le Utah, qui a perdu ses jambes en essayant de monter dans un train en marche. Il était abasourdi de constater qu’il y avait encore des gens qui étaient blessés ou tués conséquemment à des comportements dangereux autour du domaine ferroviaire. En partageant son histoire, il espère de rappeler aux jeunes qu’il n’est jamais sécuritaire de jouer près des trains et que les conséquences de le faire peuvent être mortelles.
« J’ai été chanceux de vivre les 50 dernières années. Peu de gens survivent d’avoir été frappé par un train. C’est parce que je me sens un peu comme un oiseau rare que j’ai contacté Opération Gareautrain. Si je peux éviter à quelqu’un de vivre ce que j’ai vécu, alors partager mon histoire aura valu le coup. »