Pour les familles des victimes, l’impact d’une tragédie ferroviaire dure toute la vie

10 janvier, 2018

Depuis plus de vingt ans, Simonne McNorton se donne la mission d’éduquer les enfants sur la sécurité ferroviaire—pour une raison très personnelle. Il y a vingt et un ans, sa propre fille a été tuée par un train.

En juillet 1996, la fille de 11 ans de Simonne, Krista, et sa fille de 15 ans, Jen, prenaient un raccourci par une voie ferrée à Tecumseh, à l’est de Windsor, en Ontario. L’aînée de Simonne, Jen, a réussi à sauter de la voie quand elle a entendu le train arriver. Mais pas Krista.

Depuis ce jour tragique, Simonne partage l’histoire de sa famille dans l’espoir de sauver d’autres jeunes vies. Elle a récemment parlé à Opération Gareautrain de cette journée tragique et de la façon dont une erreur innocente a changé sa famille à jamais.

Pouvez-vous me parler de l’accident de votre fille ?

Ma fille aînée avait déjà utilisé cet itinéraire dans l’un des parcs de notre petite ville de Tecumseh. La clôture n’était pas complète, alors on pouvait aller jusqu’au bout et traverser par la voie ferrée de l’autre côté. Elles avaient une bicyclette—elles étaient deux dessus—et ont décidé de prendre le raccourci. Elles marchaient au milieu de la voie et, très vite, ma fille aînée Jen a entendu le klaxon du train. Elle a dit que c’est arrivé si vite qu’elle a à peine compris ce qui se passait.

Elle a reculé, elle a regardé sa sœur et une masse d’acier est passée devant elle. Le train était juste à côté d’elle, elle se demande comment elle n’a pas été aspirée. Il est clair que le train est arrivé en quelques secondes et qu’ensuite il n’y avait plus rien. Sa sœur n’était plus là. Elle avait disparu. Elle pouvait voir que le train s’était arrêté, et elle regardait, mais ne voyait rien. Elle a donc regardé dans une autre direction et c’est alors qu’elle a vu la bicyclette enroulée sur elle-même et qu’elle tombée en état de choc. Je crois qu’elle est tombée à genoux et qu’elle s’est mise à hurler parce qu’elle savait que quelque chose de grave s’était passé.

Des gens arrivaient de toutes les directions parce qu’ils entendaient ses hurlements. Tout le monde a commencé à chercher, mais personne ne pouvait trouver ma fille Krista. Elle n’était nulle part. Ça a pris un certain temps et, finalement, on m’a dit qu’on l’a trouvée dans les herbes hautes. Elle avait été heurtée dans le dos et son corps avait été projeté dans les herbes, et c’est là qu’elle gisait. Elle est morte instantanément.

C’était la première fois qu’elle prenait ce raccourci. Et ce raccourci était utilisé de nombreuses fois par jour par de nombreuses personnes, parce que c’était une chose pratique et facile à faire à l’époque. Elle s’apprêtait à quitter la voie, mais comme elle avait le vélo, ça l’a retardée de quelques secondes, et ces quelques secondes ont fait toute la différence. Et la question qui revenait sans cesse—pendant les jours, les mois et les années qui ont suivi—était pourquoi n’avaient-elles pas entendu le train ? Pourquoi c’était arrivé, ou comment ça avait pu arriver ?

Qu’est-ce que vous espérez en partageant l’histoire de votre famille ?

Je suis tout simplement une personne qui parle ouvertement de l’histoire. Quand les gens posent des questions, je réponds. Ce qui est arrivé à notre famille en 1996 était notre réalité et notre vérité, et nous étions complètement dévastés. Alors que les années passaient, on me demandait de partager notre histoire pour différentes raisons, que ce soit pour soutenir d’autres parents ou pour sensibiliser et aider les autres. Je pense que les gens de tous âges, en particulier les enfants, doivent comprendre qu’il faut vraiment rester loin des voies ferrées.

Mes enfants ne jouaient pas sur la voie, c’était simplement très innocent. C’était juste un raccourci. Mais malheureusement, ce raccourci a tué Krista. Et vous savez, le message est vraiment juste d’être prudent, de ne pas prendre de raccourcis par les voies ferrées, de ne traverser qu’aux endroits désignés et de faire attention à tous les signaux.

Je crois que même si le fait de partager mon histoire fait une différence pour une seule vie, ça vaut la peine. Mais j’espère que l’impact est beaucoup plus grand.

Quel serait votre message aux parents en particulier ?

Je crois que je leur dirais de porter attention au voisinage et à l’endroit où ils habitent. Et s’il y a des voies ferrées à proximité, de faire particulièrement attention. Nous vivions près de voies ferrées quand j’étais jeune, et je me souviens que j’avais quasiment l’impression que les voies ferrées étaient un chemin plus sécuritaire, alors qu’elles représentaient un très grave danger. J’aimerais y avoir pensé et m’être dit « il y a des trains qui passent à toute vitesse près d’ici », et avoir dit à mes enfants « n’y pensez même pas, n’allez jamais là-bas ».

Je dirais également aux parents de s’assurer de sensibiliser leurs enfants le plus possible. Et de raconter l’histoire de ma petite fille. Ça ne prend qu’une seconde. C’était juste un innocent « prenons un raccourci et nous arriverons beaucoup plus vite ». Malheureusement, cette décision a tout changé pour ma famille.